Ce texte est tiré en partie d’un chapitre de mon nouveau livre Jésus raconté par ses proches. Mon nom est Lévi, dit Matthieu. Je suis galiléen de Capharnaüm, le dernier apôtre appelé par Jésus. J’étais collecteur d’impôt, donc très impopulaire auprès des gens que je taxais à outrance. J’étais un pécheur, un publicain, à la solde de l’empereur romain. Je comprenais la réaction négative des apôtres quand Jésus m’appela à sa suite. Un jour, il posa son regard sur moi, comme s’il discernait une urgence. J’étais assis à mon bureau de publicain, près de la place du marché, et je sentis mon âme mise à nue. Ah! le regard de Jésus ce jour-là. Comme il était pénétrant de tendresse, rempli de miséricorde. Il m’appela d’un ton décisif : « Viens. Suis-moi ! » Alors, je le suivis avec empressement. Je sortis derrière le comptoir sans m'occuper de ramasser les pièces de monnaie éparses, de...
Le blogue de Jacques Gauthier
Je me prépare de nouveau à partir pour la France et c'est toujours exaltant, quoique plus fatiguant à 63 ans. La première fois, j'avais vingt ans, et toutes mes dents. C'était en mars 1973. Tout était à découvrir. Je désirais vivre l'Évangile à fond, suite à une conversion au Christ le 2 juin 1972. J'ai vécu six mois à l'Arche de Jean Vanier, près de Compiègne, en partageant le quotidien avec des personnes handicapées. Je suis revenu au Québec pour vivre quatre ans comme novice à la Trappe d'Oka. Puis ce furent les études en théologie à l'UQTR et à l'Université Laval. J'ai fait un doctorat sur le poète Patrice de La Tour du Pin, d'où mes nombreux séjours dans sa famille à Paris et au Bignon-Mirabeau, dans le Loiret. Je suis retourné en France à d'autres occasions pour de mémorables tournées autour des livres La crise de la quarantaine et...
Extraits du chapitre de mon livre Jésus raconté par ses proches, dans lequel Nathanaël, dit Barthélemy, témoigne de sa relation avec Jésus. Je suis un Galiléen de Cana. On me surnomme Barthélemy, le fils de Tolmaï. J’ai rencontré Jésus à Bethsaïda dans la maison de Pierre, au nord du lac, non loin de Capharnaüm. C’est Philippe qui m’a parlé de lui : « Nous avons trouvé Jésus de Nazareth, fils de Joseph, de la race de David. Celui dont ont parlé Moïse et les prophètes ! » Connaissant bien les Écritures, je lui répondis :« De Nazareth peut-il sortir quelque chose de bon ? » Comme réponse, il m’a simplement dit de venir et de voir. Quand je suis arrivé avec Philippe, Jésus était seul. En me voyant arriver, il me dit: « Voici vraiment un Israélite : il n’y a pas de ruse en lui. La paix à toi, Nathanaël » « Comment me connais-tu ?...
À cause de son élévation vers le ciel, la montagne est considérée dans plusieurs traditions religieuses comme un lieu de paix qui rapproche de Dieu. Jésus lui-même se retirait sur les montagnes pour prier son Père. On retrouve quelques montagnes dans la Bible où se vit l'expérience de la rencontre de Dieu: Sinaï, appelé aussi Horeb; Sion qui désigne Jérusalem; les montagnes anonymes de la multiplication des pains chez Jean, des béatitudes chez Matthieu, et de la transfiguration, que la tradition identifie comme le Thabor. Cette montagne est une véritable oasis de paix qui surplombe la Galilée. J'ai eu la grâce de m'y rendre un jour lors d'un cours biblique en Israël et je n'oublierai jamais le calme qui y régnait. Vous avez peut-être déjà ressenti cette expérience de plénitude intérieure quand on prie, seul ou avec d’autres, sur la montagne. L'air devient plus frais à mesure que l'on monte, le...
Ce texte est un extrait du chapitre "Simon, fils de Jonas, surnommé Pierre", tiré de mon livre Jésus raconté par ses proches (Parole et Silence / Novalis), 2015. J’aime tellement le Maître que je m’emballe toujours très vite à son sujet. C’est tout ou rien, bien que j’oscille entre la foi et le doute. Je marche sur la mer quand je le vois venir, mais je m’enfonce au premier coup de vent. Je veux le suivre partout, mais je refuse qu’il me lave les pieds au dernier repas et qu’il se mette ainsi au bas de l’échelle comme un esclave. Je jure que je ne l’abandonnerai jamais, pourtant je le renie trois fois quand il est arrêté. Jésus m’a toujours pardonné, et il m’a appris l’humilité, m’évitant de sombrer dans le désespoir, en me laissant assumer ma vie et ma foi. Avec lui, j’ai osé la confiance en acceptant de ne pas...
Fêté le 25 juillet, Jacques est l’un des premiers apôtres de Jésus avec Jean, André et Pierre. Cette ancienneté lui vaudra l'appellation de « majeur », en opposition à son homonyme, Jacques d'Alphée, cousin de Jésus. Frère aîné de Jean l’évangéliste, les deux sont fils de Zébédée, un patron pêcheur du lac de Tibériade. Disciples de Jean Baptiste, ils ont suivi Jésus après son baptême pour devenir des pêcheurs d’hommes. Leur mère Marie Salomé suivra également le Maître avec d’autres femmes. Fils du tonnerre De tempérament fougueux et impulsif, Jacques hérita de ce surnom avec son frère Jean : « fils du tonnerre » (Boanerguès). Un jour que les apôtres montaient à Jérusalem, Jésus en envoya quelques-uns en avant de lui, dans un village de Samaritains, pour préparer sa venue. On le sait, les Juifs méprisent les Samaritains qui sont séparés de Jérusalem depuis la mort de Salomon. Ceux-ci chassèrent les messagers et refusèrent donc de...
Le 22 juillet, l'Église fait mémoire de sainte Marie Madeleine. Selon le désir du pape François, sa mémoire liturgique a été élevée au rang de fête dans le calendrier romain. Un décret a été signé en ce sens au Vatican le 3 juin 2016. La célébration liturgique de cette femme aura désormais le même caractère festif réservé à la célébration des apôtres. Marie Madeleine est la première à rencontrer le Christ ressuscité, la première à lui rendre témoignage devant les Apôtres. C'est pour cela qu'on l'a appelée «l'apôtre des Apôtres». Je lui laisse la parole, à la suite de ma méditation des évangiles que l'on retrouve dans Jésus raconté par ses proches (Parole et Silence-Novalis, 2015). Je ne faisais pas partie du groupe des Douze, mais cela ne m’a pas empêché d’être très proche de Jésus. Il est venu me chercher loin, le Fils de l’Homme inespéré, pour me délivrer des démons et des passions...
Né près de Jérusalem, Thomas est l’un des trois apôtres judéens avec Simon le Zélote et Judas. On l’appelle Didyme, ce qui veut dire jumeau en grec. On a surtout retenu de lui son incrédulité après la résurrection. Oui, il a douté, comme les autres, mais cela lui a valu une expérience unique avec le Christ ressuscité. Nous nous reconnaissons dans son doute et son geste de foi. N’oublions pas, qu’après avoir touché les plaies de Jésus, il lui a donné son véritable titre, la proclamation la plus claire de sa divinité : « Mon Seigneur et mon Dieu » (Jn 20, 28). Thomas était prêt à suivre le Maître jusqu’au don total de sa vie. Quand Jésus était retourné en Judée pour ressusciter son ami Lazare, les Douze savaient qu’on cherchait à l’arrêter, et même à le lapider. Aller en Judée, c’était aller à la mort. Thomas dit aux disciples avec tout...
Un jour, je participais à une table ronde sur la poésie et le sacré. Je parlais de la beauté des poèmes de saint Jean de la Croix. Mon interlocuteur écrivain partageait mon admiration, mais il ne comprenait pas la foi du poète. Comment croire en un Dieu qui envoie son Fils dans le monde pour nous sauver sur une croix? me lança-t-il. En effet, sans la foi, comment adhérer à un tel mystère? Saint Paul évoque très bien ce paradoxe d’un Dieu qui s’abaisse par amour jusqu’à s’anéantir sur la croix pour nous élever par sa résurrection (Ph 2, 6-11). Paradoxe chrétien d’unir ainsi souffrance et joie, vendredi saint et Pâques, puisque l’amour de Dieu absorbe tout. Paradoxe du langage qui a besoin du silence pour méditer ce mystère de la kénose divine (anéantissement). Paradoxe de Dieu qui a besoin de nous pour se révéler. Paradoxe de se vider de soi...
Il y a toute sorte de tempêtes dans nos vies personnelles, conjugales, familiales, ainsi que dans nos sociétés et nos églises. Par exemple, si on jette un regard extérieur sur le catholicisme québécois, en se fiant seulement aux sondages et aux statistiques, on peut dire que la barque Église prend l’eau. Nous sommes tentés de dire avec les disciples : « Maître, nous sommes perdus ; cela ne te fait rien ? » (Mc 4, 38) Un regard de foi voit plus loin ; il part de l’Évangile pour confronter l’Église aux paroles et aux gestes libérateurs de Jésus. Il est vrai que la tempête fait rage, mais Jésus est dedans la barque, et même s’il dort, il est là. N’est-ce pas l’essentiel, être avec Jésus ? C’est une question de foi et de confiance. L’Église catholique québécoise, comme une grande partie de l’Église dans les pays développés, est affectée par la défection des fidèles et des jeunes...
Le germe, personne ne l’aperçoit quand le grain meurt. La nuit seule en est témoin. Un jour paraît la pousse. Mais il en a fallu des nuits pour en arriver là! Dieu est en nous comme une semence et son règne germe dans notre humanité. Il est patient, son temps n’est pas le nôtre. Sa semence travaille en secret. C’est lui qui fait grandir. Baptême de lumière, prière de silence. « Il en est du règne de Dieu comme d’un homme qui jette en terre la semence : nuit et jour, qu’il dorme ou qu’il se lève, la semence germe et grandit, il ne sait comment. D’elle-même, la terre produit d’abord l’herbe, puis l’épi, enfin du blé plein l’épi » (Marc 4, 26-28). Qui donne reçoit. Rien ne se perd quand c’est de l'amour. En échange de ce qui est périssable, nous récoltons un fruit qui demeure. Il ne manque que la...
Du plus loin que je me souvienne, j’ai toujours eu conscience de la réalité de Dieu. Je ne peux pas faire fi de cette expérience qui est le fondement de ma vie : il y a quelqu’un plutôt que rien. Le fait de croire en lui me rend heureux. Si Dieu ne sert à rien, par contre, ça change tout. Certes, il est possible de vivre une vie pleine et heureuse sans Dieu. Chaque personne a ses raisons de croire en lui ou pas, et nul besoin de tourner le croyant ou l’incroyant en dérision pour justifier sa position. Un acte de foi et d’amour Pascal parle de la foi comme d’un pari. Nous ne pouvons pas posséder Dieu comme si nous l’avions dans notre poche, encore moins l’enfermer dans une boîte. Il nous échappe sans cesse au foyer de notre conscience, mais son élan de vie crée du sens. Lorsqu’on...
"Le style est l'homme même". Cette formule célèbre de Buffon, extraite de son discours prononcé à l’Académie française le 25 août 1753, s’applique bien au cardinal Jean-Claude Turcotte. Non que celui-ci ait été un écrivain; il reconnaissait qu’il n’avait aucun talent pour écrire. Par contre, il aimait parler aux gens, aider les pauvres, rencontrer les médias, sans se défiler devant aucune question. C’était le style Turcotte : simple et direct, fidèle à l’Évangile, doté d’un sens de l’humour et « d’un gros bon sens pastoral », comme l’exprimait de Rome le cardinal Marc Ouellet dans un message vidéo. Le cardinal Turcotte était un bon vivant, un homme pratique, qui savait consulter et prendre des décisions. Sa franchise et sa simplicité plaisaient aux journalistes. Fidèle à l’enseignement de l’Église, il restait ouvert aux défis de ce temps, mais ne transigeait pas avec sa conscience, ses convictions. C’est ainsi qu’il remit son insigne de l’Ordre du Canada après...
Existe-t-il de saintes colères ? Nous n’avons pas à tout accepter, mais à aimer, parfois avec colère, comme le Christ a chassé les marchands du Temple par amour pour la maison de son Père. Il y a des situations ou des gestes qui nous choquent parce que nous sommes épris de justice et de compassion. C'est ce que Jésus a vécu dans ce récit repris par les quatre évangélistes et qui figure au 3e dimanche de Carême de l'année B. La Pâque juive approche. Jésus monte à Jérusalem pour aller au Temple, le lieu par excellence du Judaïsme. Il y a une grande affluence dans la cité, plusieurs viennent de loin. Les gens entrent et sortent du Temple comme dans une foire. Ils achètent des agneaux sur place, les égorgent pour les offrir en sacrifice. Il y a les comptoirs de change pour permettre aux voyageurs d’échanger leurs pièces de monnaie étrangère,...
Chaque carême, l'Église propose de faire avec Jésus un pèlerinage intérieur de quarante jours. Nous retournons aux sources de l’histoire du salut. Nous rencontrons différents personnages, visitons des lieux de la Palestine, renouons avec la prière. Dimanche dernier, nous étions au désert avec Jésus; au deuxième dimanche de Carême nous nous retrouvons sur la montagne, où le Christ laisse entrevoir sa victoire pascale devant Pierre, Jacques et Jean. Le Père lève le voile sur son projet de salut en transfigurant son Fils. Ce projet d’amour nous est raconté dans l’Évangile qui est en lui-même une force de transfiguration pour nous et le monde. En méditant l’Évangile, nous sommes transformés. En suivant Jésus, nous sommes transfigurés. « Qui regarde vers lui resplendira », dit-on dans un psaume. Revenir sans cesse à l'Évangile L’Évangile était le précieux guide de Thérèse de Lisieux. Elle le portait sur son cœur, s’en servait dans ses oraisons pour mieux...
L'évangéliste Jean est bien à sa place dans l'octave de Noël. Il est le chantre par excellence du mystère de l'Incarnation du Christ, le théologien du Verbe de Dieu fait homme. Nous lisons le sublime prologue de son évangile à la messe du jour de la Nativité: « Et le Verbe s’est fait chair, il a habité parmi nous, et nous avons vu sa gloire, la gloire qu’il tient de son Père comme Fils unique, plein de grâce et de vérité. » (Jean 1, 14) J'ai déjà écrit sur ce prologue dans un blogue sur Noël. L’apôtre bien-aimé se définit comme « celui que Jésus aimait » (Jean 13, 23). Il se nomme ainsi dans son évangile sans dire explicitement que c’est lui, par humilité sans doute, et aussi par solidarité avec les autres disciples. À la dernière Cène, il reposa sur la poitrine du Seigneur, sans se mettre de l’avant. On ne peut lire son...
Je vous partage ma préface du livre de Rodhain Kasuba Malu, paru à Paris aux éditions Karthala, dans la collection Signes des temps, sous le titre: Joseph-Albert Malula. Liberté et indocilité d'un cardinal africain. Ce livre est le fruit d’une thèse de doctorat déposée à l’université Saint-Paul d’Ottawa en 2007 : L’Église et sa mission dans l’œuvre du cardinal Joseph Albert Malula. Contribution à l’élaboration de l’ecclésiologie africaine et au processus de la contextualisation de la théologie. J’étais présent à la soutenance. Si Rodhain Kasuba Malu a défendu sa thèse avec brio, il a su la remanier habilement pour rendre la lecture agréable, captivante, nous faisant découvrir « une extraordinaire aventure humaine devenue au fil des temps une incroyable histoire d’amour entre un homme et la Parole, entre une figure et un peuple ». Rodhain, c’est ainsi nous l’appelons amicalement au Québec, est originaire du diocèse d’Idiofa au Congo-Kinshasa. Il...
La Parole nous met sans cesse en route pour que nous bâtissions le Royaume de Dieu qui est déjà là mais pas pleinement réalisé. Aujourd’hui, il est question d’une double appartenance : la communauté de foi et la société civile. Saint Augustin parlait de deux cités : la cité céleste à venir, symbolisée par l’Église, et la cité terrestre, dont le chef est l’empereur, le président ou le premier ministre. Les relations entre la cité de Dieu et la cité des hommes sont complexes. Ce sont deux réalités différentes qui ont leurs règles et qui ne devraient pas entrer en concurrence. Le danger est que César se prenne pour Dieu ou que ceux qui parlent au nom de Dieu se prennent pour César. Jésus répond à ce dilemme par une parole pleine de bon sens qui deviendra un proverbe courant : « Rendez à César ce qui est à César, et à...
Le philosophe Sören Kierkegaard avait écrit : « Dieu n’a qu’une seule joie : communiquer… Il n’a qu’une passion : aimer et vouloir être aimé ». Est-ce aussi notre joie, notre passion ? Dieu n’est que joie et amour, et nous sommes créés à son image et à sa ressemblance, c’est pourquoi « la joie de notre cœur vient de lui » (Ps 33, 21). Dans mon Petit dictionnaire de Dieu (Novalis), j’ai écrit ceci au mot « joie » : « La joie est assise au secret de mon silence. Elle s’installe et je me laisse envahir, impuissant à compter mes mérites. Vouloir la posséder, c’est la laisser faire. Plus elle se cache, plus elle m’appartient. Plus elle disparaît, plus je la connais. Cette joie est fragile comme tout ce qui commence ; une joie d’aube qui ne fait pas de bruit, une joie intérieure pleine de promesses, une joie mystique plus forte que la mort. « Joie,...
Au 3e dimanche du Carême A, l'Église propose un récit qui ne laisse personne indifférent, celui de la rencontre de Jésus avec la Samaritaine au puits de Jacob (Jn 4, 5-42). Jean est le seul à rapporter cette histoire aux multiples interprétations. J'y vois surtout un enseignement très construit sur la soif de Jésus, "Donne-moi à boire" (Jn 4, 7) et celle de la Samaritaine. La scène se développe en trois étapes : le puits, le mari de la Samaritaine et les croyances des Samaritains. Ce récit est l’histoire d’une rencontre de deux désirs et de deux regards : celui de Jésus et celui de la Samaritaine. Il y a ici un contact qui va toucher le cœur des deux personnages, symbole de ce puits intérieur où nous sommes appelés à y boire l’eau vive. Jésus va révéler à cette femme, malgré les interdits, la vérité profonde qui l’habite. Son regard sur elle-même va...
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